Sarah Moon

Sarah Moon

#Photographe #Artiste #Auteur #Incontournable #Mode #Pionnier
Sarah Moon née en 1941, dans une famille juive qui doit fuir la France occupée, Sarah Moon ne dit rien de son enfance, de ses années passées en Angleterre, de son père ingénieur, des ses quatre frères et sœurs...

Pourtant l'analyse de ses oeuvres amène à penser que son enfance a été déterminante pour un art dont le style est très arrêté.

Des constantes se retrouvent en effet dans ses photographies :

le rapport à une nature inaccessible et confinée. La nature est conjuguée au passé ; on y trouve des pyramides, des rhinocéros, des mythes, au moins de la nostalgie, parfois de la tristesse pas de vrai blanc dans ses images, tout est en low key, pas d'échappées claires dans les ciels du flou, du vignettage de l'exotisme : animaux ou monuments lointains, avec une tonalité coloniale souvent du mouvement, comme effacement des premiers plans des yeux fermés, ou des visages effacés ou baissés des références aux années 30, à la modernité (dans le vêtement, dans la représentation de la femme)
une grande importance des mains (qui sont la partie du corps des adultes à la hauteur du visage d'un enfant…)

la martyrisation (par le corset, par les griffures, par le grattage du négatif)
l'allusion au cauchemar d'enfant
des personnages sans tête, sans bras, sans mains ou avec des bras en bois, ou amputés, une assimilation des êtres à des poupées un espace confiné auquel on n'échappe pas des signes, du graphisme contrasté augmentant le confinement par des impératifs autoritaires le silence, dont la suggestion dans l'image est renforcé dans le procédé par l'interposition de matières, de gestes, de cadres, de grattages entre le sujet et le spectateur.

Ces éléments nous semblent directement mener à une interprétation autour du souvenir de la prime enfance dans une Grande-Bretagne en guerre, un pays obligé d'appeler à l'aide les forces vives de ses colonies... d'où une atmosphère pleine d'inquiétude, de violence et de mutilation conjuguée au passé, avec la guerre en creux, une atmosphère où l'ailleurs colonial dans sa vision enfantine déborde de partout. Où le cadre familial confiné n'empêche pas l'arrivée des monstres et des mutilations probablement liées à l'omniprésence de la guerre. L'ailleurs est ainsi toujours présenté entre rêve, menace et souvenir dans une décor qui tient de la nature empaillée du musée d'histoire naturelle et de la violence du cirque.