Nous vous l'avons présentée dans ses grandes lignes il y a quelques jours : la première Biennale de la Photographie de l'Océan Indien s'ouvrira dans deux mois et promet d'être un des grands événements culturels de 2005.
Quand on entreprend de mettre sur pied une manifestation de cette ampleur, la démarche la plus évidente consiste à solliciter les compétences les plus reconnues. Encore n'est-elle pas toujours possible, pour l'une ou l'autre raison : on pense pouvoir se passer d'expériences pourtant irremplaçables et on ne songe pas à leur demander de s'impliquer ; ou ces personnes, que l'on voudrait voir participer à l'organisation, ne sont pas disponibles, dans la mesure où elles ont souvent de nombreux engagements. Dans le cas de la Biennale, les deux écueils ont été évités. Non seulement on n'a pas fait l'économie du meilleur et du plus célèbre photographe de la Grande Ile, Pierrot Men, mais en outre il a accepté de jouer le rôle de Commissaire.
On connaît les qualités esthétiques exceptionnelles de son travail, reconnu non seulement ici mais aussi dans le monde entier. Les compositions graphiques de ses clichés en noir et blanc sont d'une limpidité qui touche au premier coup d'œil. Et, au deuxième coup d'œil, on trouve encore plus de plaisir à admirer ses œuvres.
En outre, ceux qui ont eu la chance de côtoyer Pierrot Men connaissent aussi son humilité – comme chez la plupart des vrais grands artistes – et, plus important encore peut-être dans le cas qui nous occupe, le sérieux de ses engagements.
Avant même la conférence de presse qui présentera dans le détail la première Biennale de la Photographie de l'Océan Indien, il a accepté de répondre aux questions que nous lui avons posées.
La Gazette de la Grande Ile – Comment envisagez-vous votre rôle de Commissaire de cette première Biennale de la Photographie de l'Océan Indien ?
Pierrot Men – D'une manière sérieuse, en mettant mon expérience et mon regard pour que cette Biennale soit reconnue tant au niveau national qu'international. De plus, pour la mise en œuvre, je bénéficie de l'aide d'un adjoint : Monsieur Jérome Chenieux, qui mettra aussi ses nombreuses compétences dans l'apport d'une plus-value à cette manifestation.
– Comment trouvez-vous les moyens d'investir du temps et de l'énergie dans une manifestation nationale, alors que votre réputation est beaucoup plus large ?
– Une manifestation de ce genre demande beaucoup de temps de préparation. Les organisateurs doivent y mettre toute leur énergie. De mon côté, avec la passion, je peux donner du temps au temps. Il y a des créativités photographiques dans toutes les cultures, particulièrement à Madagascar qui a été la fondation de ma reconnaissance au niveau international.
– Quelle est, à vos yeux, la situation actuelle de la photographie à Madagascar ? Rencontre-t-elle des problèmes spécifiques à notre pays ?
– Même pour un passionné, la photographie nécessite beaucoup de moyens et d'investissements (pellicule, appareil, tirage…), ce qui constitue un frein à la filière, situation contradictoire avec l'image qui est partout . Il y a une carence en matière de formation, et d'un cursus dans ce domaine particulièrement pour la jeunesse. La photographie ne nourrit pas son homme et encore moins sa famille. Il est important d'avoir une autre ressource.
– Les photographes de Fianarantsoa sont annoncés dans une exposition collective. Y a-t-il, dans votre ville plus qu'ailleurs, une effervescence particulière dans le monde de la photo ? Et… cela aurait-il un rapport avec votre présence ? Vous arrive-t-il, par exemple, de travailler avec d'autres photographes, de les conseiller… ?
– A Fianarantsoa, il existe quatre laboratoires photographiques « minilab » et deux autres sont en cours de création. Par ailleurs, deux associations de photographes amateurs existent (une centaine de membres). Ces deux aspects apportent une dynamique dans le domaine. Régulièrement, lors des concours nationaux, plusieurs d'entre eux sont primés. Et ils viennent fréquemment me consulter pour les conseils ou tout simplement parler de l'art de la photographie. En outre, j'ai soutenu le projet « L'Envolée » avec la photographe Karine Gougerot, qui consiste à éveiller une culture photographique chez les enfants des écoles primaires (EPP et école francaise) de Fianarantsoa, conjointement avec des écoles primaires de France.